26 juillet 2013

14 juillet 2013

Faut-il être un intello élitiste pour écrire correctement ?

Nous sommes nombreux à nous plaindre du fait que les gens écrivent n'importe comment sur internet mais je crois qu'ils sont plus nombreux encore à se plaindre du fait que nous nous en plaignions...

Il m'est déjà arrivé plusieurs fois de faire gentiment remarquer à des gens, sur les réseaux sociaux ou les forums, qu'ils faisaient une faute par mot, que cela rendait leur textes difficiles à lire et qu'il serait bien qu'ils fassent un effort. Parce que regardez, c'est plus facile de lire ce que vous venez de lire que ceci : « Il mé deja arriver plusieur foix de faire gentillement remarqué a des gens sur les réso sociau où les forum qu'il fesait une fautte par mot que ca render leur text dificile a lire et qu'il serai bien qu'il face un efort ».

Systématiquement, la personne concernée et TOUTES les personnes impliquées dans le fil de discussion me sont tombées dessus, m'expliquant qu'ils en avaient marre des « intellos élitistes » qui méprisaient les pauvres gens qui n'avaient pas eu la chance de recevoir une bonne éducation, et que de toute façon on s'en fichait de l'orthographe et que mon « élitisme » portait atteinte à leur liberté d'expression à eux, les « gens du peuple ». Quelques facebookiens m'ont même viré de leurs @mis pour cela !

Oui... sauf que tous les ordinateurs ont désormais un correcteur d'orthographe intégré et que si j'écris « ortografe » sur Facebook le mot sera souligné en rouge, de sorte qu'il me suffit d'un click droit pour que mon mot soit corrigé (et que, au passage, j'apprenne à l'écrire correctement). Moi-même j'ai grandement amélioré mon orthographe, au fil des années, grâce à cette fonction. Alors tout de même, ce n'est pas comme si je demandais à ces pauvres gens de repasser leur bac et d'entreprendre un cursus universitaire de cinq ans ! Il s'agit juste de faire un tout petit effort pour s'exprimer lisiblement.

Mais après tout, à quoi bon ? Peut-être parce que les mots sont porteurs de sens, parce que ce sens est un outil de communication, et que la communication et l'usage de la langue écrite sont ce qui a au départ permis à l'être humain de s'élever, de transmettre aux générations à venir les connaissances des générations passées. Peut-être parce qu'un bon usage des mots et de leur sens est la clé d'un développement exponentiel de nos démocraties et de notre liberté d'expression. La langue est un outil mais c'est aussi un vecteur de concepts. Déformer la langue, c'est déjà déformer les concepts qu'elle véhicule. Il n'est d'ailleurs pas anodin de constater que généralement, les gens qui font une faute par mot ont une pensée totalement confuse : les idées qu'ils expriment s'enchaînent souvent de manière chaotique, ils accumulent les clichés et les lieux communs et sont incapables d'organiser leurs discours de façon structurée. De fait, leur refus d'écrire correctement (du moins d'essayer) s'accompagne généralement d'un refus de penser de manière rationnelle et cohérente. Sans déconner, j'ai lu des trucs hallucinants ! Par exemple ce mec qui commence un post sur Facebook par la nécessité de lutter contre le cancer... en postant tous sur Facebook qu'il faut lutter contre le cancer (!) et qui d'un coup, dans le même fil de discussion, balance qu'il n'a pas parlé à sa grand-mère depuis deux ans parce qu'elle est méchante et qu'il ne sait pas si il doit la rappeler, et tout le monde en cœur saute avec lui du cancer à la grand-mère sans s'émouvoir du fait que ceci n'a rien à voir avec cela ! Et quant à moi, je me suis fait fumer parce que d'une part j'ai milité pour l'orthographe et que d'autre part j'ai refusé d'écrire sur mon mur qu'il fallait lutter contre le cancer en écrivant sur son mur qu'il faut lutter contre le cancer ! Un autre exemple, encore autrement plus dingue : je vous invite à lire les commentaires que j'ai reçus sur cet article, c'est édifiant !

Nous sommes à un doigt de la folie, et si demain un régime totalitaire devait prendre le pouvoir, ces pauvres bougres seraient les premières victimes de son ministère de la propagande. Alors si mon élitisme met en danger leur liberté d'expression, je serais tenté de dire qu'ils se mettent eux-même autrement plus en danger. Parce qu'en refusant de réfléchir à la manière dont ils usent de leur liberté d'expression, ils en font – si j'ose dire – une aliénation d'expression (j'ai déjà abordé ce thème sous d'autres angles ici, ici et ici).

Mais je ne suis pas passéiste : je ne vais pas, comme certains, me lamenter sur le fait que tout part à vau l'eau et que c'était mieux avant. Je vais simplement m'interroger sur les causes de ce phénomène. Il y a d'abord la simple existence d'internet : des tas de gens qui, avant, n'avaient pas la possibilité de s'exprimer publiquement, sont désormais libres de le faire, et ceci reste évidemment une bonne chose. Mais je crois que s'il faut chercher un responsable, c'est du côté de la télévision – et particulièrement des reality-shows – qu'il faut se tourner. Oui je sais : c'est facile de s'en prendre à la télé mais attendez, vous allez voir où je veux en venir ! Je me souviens, lorsque j'étais petit, il n'y avait que trois chaînes publiques, suivies peu à peu par quelques autres (Canal +, La Cinq, M6 et finalement Arte). Certes l'offre télévisuelle était bien limitée en comparaison des dizaines de chaînes francophones que nous offrent désormais le câble, le satellite et la TNT. On y perdait en diversité, on y perdait parfois aussi en qualité (pas de Planète, de National Geographic, de Chaîne Histoire, de Canal Jimmy ni de Paris Première...) mais par contre on n'avait pas encore de télé-réalité. La télévision n'était pas un forum d'expression populaire, c'était un média difficile d'accès, réservé à une certaine élite intellectuelle, triée sur le volet par les animateurs et les programmateurs. Il y avait certes les jeux, mais les gens ne venaient pas y parler de leurs vies. Il y avait certes des émissions de divertissement populaire complètement idiotes mais elles étaient tout de même remplies de gens qui, en dépit du fait qu'ils faisaient de la merde pour faire du fric, n'en étaient pas moins à la base des gens éduqués. De fait, la télévision des années 50 aux années 90 avait tout de même tendance à mettre en valeur, à travers les gens qu'elle exhibait, la culture et l'éducation. La télévision étant, c'est indéniable, un modèle pour les « masses », on peut donc aller jusqu'à dire qu'elle tirait tout de même un peu les masses vers le haut. Parce que tout le monde voulait passer à la télé, mais pour passer à la télé il fallait faire preuve d'une certaine intelligence, d'une certaine culture, avoir accompli quelque chose ou avoir quelque chose à dire !

La télé-réalité a soudain bouleversé cette équation : désormais, n'importe qui est susceptible de passer à la télévision pour n'importe quelle raison ! Vous avez des problèmes de couple ? Venez les résoudre avec notre psychiatre ! Vous avez un look de merde ? Venez vous relooker avec nos spécialistes ! Vous détestez les majorettes ? Mettez-vous une semaine dans la peau d'une majorette ! Etc. Ce à quoi on assiste depuis une dizaine d'années, c'est à l'invasion des écrans par toutes sortes de gens, souvent parmi les plus abrutis, les plus ignorants, les plus inconscients de leurs problèmes psychologiques, de leur vulgarité, de leurs préjugés. Sans déconner, les gens que j'ai vus à la télé dans certains de ces programmes ! C'est à frémir ! Je ne sais même pas si j'ai le droit de les appeler des gens, parce que j'ai vu des chats ou des chiens avoir des moments de vivacité intellectuelle plus dynamique que certains d'entre eux !

Et là, reprenons l'équation citée plus haut (« La télévision étant, c'est indéniable, un modèle pour les « masses », on peut donc aller jusqu'à dire qu'elle tirait tout de même un peu les masses vers le haut. Parce que tout le monde voulait passer à la télé, mais pour passer à la télé il fallait faire preuve d'une certaine intelligence, d'une certaine culture, avoir accompli quelque chose ou avoir quelque chose à dire ! ») et mettons-là au goût des reality shows : « La télévision étant, c'est indéniable, un modèle pour les « masses », on peut donc aller jusqu'à dire qu'elle tirait tout de même un peu les masses vers le bas. Parce que tout le monde voulait passer à la télé, mais pour passer à la télé il fallait faire preuve d'une certaine stupidité, d'une certaine ignorance, ne rien avoir accompli ou ne rien avoir à dire ! ». Aujourd'hui, le dernier des idiots peut allumer sa télé et... voir des gens comme lui ! Cela n'a d'autre effet que de le conforter dans son ignorance : si les gens qui passent à la télé sont incultes et grossiers, cela signifie que la vie, c'est ça ! Cela signifie qu'un Français, ça doit être comme ça, qu'il est tout à fait naturel d'être inculte et vulgaire puisque tout le monde est inculte et vulgaire et que cela n'empêche personne de recevoir la récompense suprême de notre société de spectacles : passer à la télé !

Et ce sont ces même gens qui, fiers de leur liberté d'expression toute nouvellement acquise, écrive des frases totalment ilisible sur internet é raconte nimporte koi san toléré la moindr remark.

Pour avoir érigé la médiocrité en triomphe, les responsables des grandes chaînes de télévision mériteraient d'être déchus de leur nationalité et déportés à Guantanamo ! Parce que dans une société comme la nôtre, en proie à tant de contradictions, à tant de tensions sociales, à une crise économique, à un relatif échec du système scolaire et à des banlieues prêtes à s'enflammer, ériger la stupidité en vertu est un crime contre l'humanité tout entière... en tout cas la porte ouverte à des problèmes sans fin !

Alors je vous en prie @mis internautes, ne laissez pas passer ça : faites-leurs gentiment remarquer, à ces gens qui écrivent n'importe quoi n'importe comment, que peut-être ils pourraient faire un effort, que peut-être cela a du sens d'écrire correctement, que peut-être les mots sont porteurs de sens et méritent, pour cela, d'être bien traités. Et aussi que ce n'est pas totalement inutile d'essayer d'organiser ses idées. Vous pouvez aussi rejoindre le Comité contre la médiocrité linguistique sur Facebook.


(Évidemment, avec ma chance, il est probable que quelques fautes d’orthographe, de conjugaison ou d'accord se seront glissées dans cet article ^^)

1 juillet 2013

Hors de propos

Je viens de passer une soirée formidable avec un Allemand qui s'est émerveillé du fait que je sache ce que je veux, que je m'apprête à faire ce qu'il faut pour l'obtenir et que j'accueille les mauvaises nouvelles avec autant d'indifférence.

Je sais pas trop, j'ai de leçons à donner à personne. Je peux pas tout raconter ici parce que ça n'implique pas que moi mais j'ai perdu beaucoup de choses et d'êtres chers récemment, j'ai eu ma dose de deuils et de renoncements. Cerise sur le gâteau, j'ai appris ce matin que je me voyais refuser un visa de travail pour la Chine qui m'aurait permis de gagner ma vie et d'écrire tout en même temps. Résultat des courses : il me faut obtenir un diplôme universitaire que je n'ai pas encore, un autre job quelque part en Asie en attendant et le temps de bosser, d'étudier et d'écrire tout à la fois. Et j'ai juste dit dit ça au mec en haussant les épaules : qu'il me fallait ça et que j'allais m'atteler à l'obtenir.

Et là quand il m'a dit qu'il trouvait ma détermination admirable je lui ai balancé comme ça, parce que je n'avais rien d'autre à balancer comme effet de style, que c'était la réalité, que c'était un état de fait. J'ai perdu ci et ça et que ça me plaise ou non est totalement hors de propos. Je dois faire avec. Je pourrais bien passer des jours ou des mois à me lamenter mais honnêtement ça ne résoudrait rien. Que ce qui m'arrive me plaise ou non n'a aucune importance : je dois faire avec et trouver le moyen d'avancer en faisant avec. Mes sentiments à ce sujet sont hors de propos, ils ne me mèneront nulle part. Agir me mènera quelque part. Et du coup, puisque être contrarié s'avère au bout du compte totalement inutile, ce n'est même plus la peine de me sentir contrarié ! Autant contempler ce qui est avec une certaine distance, faire ce que j'ai à faire et prendre quand même le temps de kiffer les petits plaisirs du quotidien (par exemple le dernier morceau de Lorde) ! 

Et alors là, tout d'un coup, j'ai réalisé que j'ai enfin grandi, qu'il m'a fallu traverser des océans de merde que les océans de merde de précédents ne m'avaient pas laissé entrevoir mais que, enfin, j'avais trouvé le lien que je cherchais depuis dix ans entre Ayn Rand et le bouddhisme tibétain.

On a beau dire et beau faire, que les trucs qui nous arrivent nous plaisent ou non, c'est hors de propos : il faut juste faire avec !
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